Pourquoi nous soutenons l'AEP
Entre ceux qui souhaitent une réglementation renforcée et ceux qui souhaitent en être exonérés, il y a de la marge, du moins pour ceux qui reconnaissent que des évolutions de fonds de l’agriculture sont nécessaires, mais surtout possibles pour lui offrir un avenir en Bretagne, dans le cadre d’un contrat renouvelé avec la société. C’est bien pour cette raison que l’entrée collective et donc territoriale doit être privilégiée dans le droit fil de ce que nous avons fait avec la Nouvelle Alliance autour des notions décisives de transition et de dialogue.
La démarche de progrès ouverte, à dimension variable de l'Agriculture Écologiquement Performante (AEP), permet justement de créer un climat favorable à l’émergence de solutions qui seront à l’évidence plus ou moins ambitieuses mais qui auront le mérite, nous l’espérons, de créer un mouvement d’entraînement. L’AEP n’a pas vocation à devenir un nouveau catéchisme de l’agriculture, c’est avant tout une opportunité sur laquelle peut se fonder une nouvelle articulation entre la société bretonne et son agriculture. Le choix ici fait est bien celui de l’action.
Nous approuvons donc l'AEP qui renonce délibérément à la mesure d'un écart avec une norme préalablement établie (qui est l'apanage d'une société du contrôle) au profit d'une démarche d'implication : les indicateurs seront d'abord proposés par les agriculteurs, premiers acteurs de l'écologie, et les équipes associées, validés ensuite en fonction des territoires et des objectifs.
On oppose souvent les logiques de filières et les territoires. Pour autant, ont-elles vocation à s’ignorer éternellement, surtout si on envisage une montée en gamme des productions et des produits ? Là aussi, il ne faut pas hésiter à sortir des oppositions stériles et admettre qu’une partie de la solution peut être économique à l’échelle des territoires et qu’il doit pouvoir exister des interrelations entre une volonté d’exporter des produits et d’en consommer une partie localement.
La réappropriation de la réflexion sur les conditions agronomiques de production permettra d’agir positivement pour préserver les ressources, limiter les pratiques polluantes, mieux gérer les complémentarités sur l’exploitation et au final améliorer les revenus, la qualité du travail parce que l’agriculteur redevient acteur du changement à l’échelle de son exploitation mais aussi à l’échelle de son territoire. C’est à ce niveau que l’autonomie devient intéressante et valorisante. Elle permet à l’agriculteur de sortir d’une situation subie où il n'est plus qu’un rouage d’une machine plus importante que lui, sans réel pouvoir de décision.
Une approche systémique ne se décrète pas du jour au lendemain, c’est une autre façon d’aborder l’exploitation agricole qui ne peut se construire qu’en marchant, dans la réussite comme dans l’échec. Le plus court chemin pour aller d'un point à un autre n'est pas la ligne droite bordée d'indicateurs préalables, de cahiers des charges abondant ou pire d'idéologies stériles, mais au contraire une ligne aux contours complexes faites de tâtonnements, d'intuitions, d'essais et au final de compétences.
Daniel CUEFF , Dominique RAMARD , Haude LE GUEN
Conseillers régionaux écologistes